Une interview de Élisa Yvelin

au sujet de sa performance La Conférence des Lichens

Qu’est ce qu’on boit ?

J’appelle cela un thé mais c’est plutôt une mixture à base de lichens séchés et réduits en poudre. C’est ce qui donne son épaisseur un peu gélatineuse à la préparation, quand elle est chauffée. Il y a aussi des lichens en feuilles qui ont infusé et dont on peut distinguer les formes et la texture caoutchouteuse sous la dent. J’ai rajouté du jus de pomme et un mélange d’épices pour donner un goût agréable et réconfortant, qui accompagne bien je trouve la saveur assez terreuse du lichen. Si vous en croquez sec on sent bien ce goût. En préparation comme ici on va plutôt utiliser des lichens de type foliacé, on les trouve le plus souvent sur les arbres, on peut faire sécher les feuilles. En les rinçant bien ou en les laissant tremper, leur amertume s’adoucit beaucoup.

Et c’est bien comestible ?

Oui tout à fait ! Les lichens ont toujours été utilisés dans l’alimentation, et en usage thérapeutique, notamment dans les régions nordiques où il y en a beaucoup. C’est très riche en vitamine D3 - il est d’ailleurs le seul végétal a en produire ! - et il contient plein d’actifs antibactériens et énormément de vertus médicinales.

Qu’est-ce qu’un lichen en fait ? Il fait partie des plantes ? J’ai l’impression que c’était plutôt de la famille des champignons.

Alors je viens de parler de végétal mais ce serait en effet plus proche du champignon. Longtemps, on les a répertoriés dans la catégorie des algues ou des mousses.
Ce sont en fait des organismes composés, on dit qu’ils sont symbiotiques. La symbiose c’est l’association de deux (ou plus) organismes collaborant et chacun tirant bénéfice de leur association. Ils sont composés d’une algue, de fungus et de bactéries. Les cellules microscopiques d’algues vertes qui les composent contiennent de la chlorophylle, d’où leur capacité à la photosynthèse comme les végétaux, leur permettant la production de matière organique et qui leur donne leur couleur - du orange vif au brun foncé. Mais ils sont à 90% fungus, c’est ce qui leur donne leur architecture, qui leur permet de stocker l’humidité et de se reproduire. Ces partenaires sont co-dépendants. Donc ce ne sont pas des plantes. D’ailleurs ils n’ont pas de racines, même si on peut les voir se développer sur d’autres végétaux.

Comme des parasites alors ?

Très souvent, ils sont perçus négativement, mais ils n’ont rien de parasites car ils ne prélèvent aucun élément nutritif de leur support. Ils sont autonomes d’un point de vue énergétique.
Si des lichens s’installent sur un arbre au niveau de l’écorce du tronc ou des branches, ils vont juste l’utiliser comme substrat, c’est-à-dire en support, comme ils le feraient d’un mur.
Ce qui contribue à cet apriori négatif c’est aussi que plus un arbre est âgé plus il aura tendance à avoir de lichens. Mais ils vont surtout lui donner une couche de protection.
C’est en fait une très bonne nouvelle si vous avez beaucoup de lichens dans votre jardin ou autour de chez vous ! Comme ils sont très sensibles à la pollution, leur présence est un excellent indicateur de la qualité de l’eau et de l’air.
Pour revenir à cette notion de substrat, les lichens ont conquis tous les milieux - à part les eaux profondes - d’une roche fraichement exposée à un nouveau mur en béton. On dit qu’ils sont des organismes « pionniers » comme ils sont les premiers à s’installer, et ont la capacité de rendre leur substrat fertile, ce qui peut permettre après à d’autres espèces végétales de s’y installer.

On en voit en effet beaucoup sur les trottoirs dans certaines villes, c’est vrai que le goudron n’a pas l’air de les déranger pour s’établir

Oui je les ai d’ailleurs longtemps pris pour des traces de chewing-gum, alors qu’il s’agit souvent de « squelettes » de lichens, quand la partie feuillue a été arrachée ou grattée. Sur l’asphalte, il y a aussi des espèces crustacées - en croûtes ou en grains – comme on en trouve beaucoup sur les rochers de bord de mer et sur les pierres tombales.
La plupart du temps, on ne les voit pas, ou quand on les perçoit c’est plutôt comme un élément perturbateur - peut être à cause de cette ancienne confusion de classification - mais ils nous accompagnent partout et sont comme un papier peint qu’on ne voit plus. Ils ont la qualité modeste, d’une force discrète, rasante, lente et constante, qui a su s’adapter et collaborer.
Aussi leur croissance est extrêmement lente, cela va de quelques centièmes de millimètres par an pour certaines espèces crustacées - comme ceux utilisés dans la datation de pierres - jusqu’à plusieurs centimètres par an.
Certains lichens crustacés qu’on trouve en Antarctique auraient plus de 4000 ans. Ils sont résistants à des températures extrêmes, de -70° à +70°, et aussi survivent aux changements brusques de condition atmosphérique. En fait, ils couvriraient environ 6% de la surface terrestre, ce qui parait énorme pour une espèce qu’on ne « voit » pour ainsi dire pas !

Cela semble vraiment paradoxal qu’ils aient de tels niveaux de résistance et d’adaptabilité et en même temps qu’ils soient si sensibles à la pollution

Ils sont tout particulièrement sensibles à l’oxyde de souffre qu’émettent les voitures.
Mais oui ils sont vraiment faits de vulnérabilité et d’une étonnante capacité de résilience !

Et alors les lichens que tu as collectés autour du théâtre et qu’on rencontre là, même s’ils sont secs, ils ne sont pas morts ? et ceux qu’on a avalé ?

Ceux qu’on a bu infusés ont donc été réhydratés, mais ceux qu’on voit secs là ne sont pas biologiquement « morts ». C’est ce que qu’on appelle la reviviscence – littéralement « revenir à la vie » – et c’est extraordinaire cette capacité qu’ils ont à reprendre une activité métabolique non altérée. Après des périodes qui peuvent être très longues de dessiccation, s’ils sont réexposés à des conditions favorables, leur métabolisme peut reprendre en 5 à 30 minutes !

On sait pourquoi ils ont commencé à se développer ?

J’aime penser à cette alliance, comment deux entités qui n’ont pas vraiment à voir l’une avec l’autre, se mettent à collaborer dans un contexte donné ? Peut-être pour des questions d’adaptation et de préservation de la vie, et qui ont su tisser des liens « interpersonnels » en reconnaissance de leur inter-dépendance de l’une à l’autre. Apparemment ils seraient les premiers êtres vivants - après quelques algues - à avoir conquis la croûte terrestre il y a environ 500 millions d’années quand la terre et les sols n’étaient pas ce que l’on connait aujourd’hui mais un seul continent de roche brute. En facilitant l’altération des roches ils auraient commencé à créer des sols fertiles pour l’implantation plus tard de végétaux organisés comme les mousses.

Comment tu en es venue à t’intéresser aux lichens ?

En 2017, je participais à une Biennale aux Iles Lofoten, au nord du cercle arctique. La curation s’articulait autour de questions écologiques, et pour la performance à laquelle je participais j’ai passé beaucoup de temps sur les rochers au bord de l’eau. Je devais chaque jour retrouver mon chemin dans les rochers, et j’avais comme point de référence un « truc rond orange ». Ca a duré 6 semaines, si bien que j’ai commencé à nouer une relation complice à ce « truc », qui avait l’air de faire partie de la roche dans son grainage et en même temps avait une qualité plus légère, pas si minérale. Cette relation m’a beaucoup soutenue dans cette période où être collée à des rochers en se déplaçant au ralenti était assez éprouvant !
Vers la fin du festival, il y a eu la projection d’un film sur Donna Haraway. A un moment apparaissait écrit le slogan « we are all lichens » - nous sommes tous du lichen - cependant le film ne développait pas là-dessus. Le nom me disait quelque chose mais c’est en commençant à me renseigner que cela m’a frappée : ça y est mon complice avait un nom, et j’ai commencé à les voir partout.
J’ai été extrêmement touchée par tout ce que je lisais sur les organismes symbiotiques. Tout le vivant étant engagé dans des relations symbiotiques, ça donne viscéralement un goût de connu, avec une saveur subversive, qui vient profondément chambouler notre sens d’identité. J’avais la sensation d’une forme de dépossession salvatrice, d’un sens d’appartenance à soi et pour soi.

Cela fait penser à la flore intestinale ou au microbiote comme on dit beaucoup aujourd’hui

Oui et quand on pense qu’un microbiote intestinal humain pèse entre 1 et 5 kilos, qu’il est constitué de bactéries, virus, parasites et champignons non pathogènes et que ces bactéries seraient dix fois plus nombreuses que les cellules du corps humain, c’est bouleversant. Ce que l’on considère comme notre identité se révèle être une chose bien poreuse et liminale, un grand complexe multiple d’organismes symbiotiques.
Quand Donna Haraway dit de la complexité qu’elle est impossible sans infection, avec le microbiote on voit combien l’être humain est constitué d’éléments non-humains, ce qui en fait un collectif en soi.
Je m’étais aussi beaucoup intéressée à l’embryologie et notamment à la phase de développement du tube digestif, qui correspond à une invagination d’une surface qui était externe et devient ce tube, une ouverture sur l’exterieur qu’on porte en interne par la suite et qui va garder une mémoire du dehors, tandis que ce qui va devenir notre peau reste teinté de la mémoire d’un espace intime interne - et tous les enjeux psychanalytiques que ces empreintes comportent.

Il y a aussi une maladie de peau qui s‘appelle Lichen non ? Est-ce que c’est lié ?

Alors oui lichen vient du latin lichenis, qui veut dire plante et maladie de peau, ce qui est amusant. Notre peau est aussi un espace complètement symbiotique où vivent levures, champignons etc.
Dans mon histoire somatique ou de somatisation j’ai réalisé que lorsque dans des états de stress ou quand il y a une bascule « négative » de mon paysage émotionel, ma peau au niveau du visage change de PH et se met à rejeter ou en tous cas à ne plus être un substrat accueillant pour certaines levures, ce qui peut créer des zones de conflits, une espèce de valeur frontière qui veut se ré-affirmer entre l’intérieur et l’exterieur, ce qui est de mon identité et ne l’est pas. Comment en situation de stress, des méchanismes de défense archaïques mais acquis dans l’évolution de l’espèce se mettent en branlent et déstabilisent un état symbiotique fonctionnel et en temps « normal » opérant.
Et dans des perspectives plus larges, le parallèle que je voyais avec des stratégies défensives et de renforcement au niveau des frontières des corps étatiques, générant tensions, exclusion, replis nationalistes, etc. Comment vivre cette ambivalence, que malgré le fait de partager certaines valeurs humaines et politiques, au niveau somatique l’information n’est comme pas encore passée et les modes de réaction ne sont pas en accord avec des valeurs morales vécues pourtant.
Et on voit bien aujourd’hui que la prise de conscience et la remémoration de nos mélanges humain et non-humain est inévitable pour survivre aux dommages auto-infligés par l’anthropocène.

Et comment le format de la performance actuelle s’est-il développé ?

Dans le même temps en Norvège, on m’avait commandé une performance pour un évènement qui devait réunir différentes propositions imaginant des « vivres ensemble » pour des futurs possibles.
Immédiatement les lichens étaient pour moi une réponse allégorique, effective et affective à cette demande. J’ai eu envie de proposer un dispositif qui puisse nous permettre de rentrer en contact avec des lichens au sein d’un groupe de personnes, et de pouvoir adresser leur mode symbiotique, comme un symbole d’un vivre ensemble, fait de collaboration, d’interdépendance, de résilience.
Mais surtout que cette rencontre et ce partage puisse opérer à la manière d’un antidote, comment par exemple boire le thé de lichen pourrait nous permettre de réveiller cette sagesse de la symbiose qui nous constitue et nous motorise.
Sagesse oubliée, tellement on est pris par les prismes d’une culture dominante faite de narrations imposées et normalisées, de l’individualisme à la logique du héros, valeurs centrales dans notre société aujourd’hui.
Il y avait le souhait de réveiller des mémoires cellulaires et des imaginaires pour se rappeler d’un autre rapport au monde. Puisqu’il m’apparaissait qu’il s’agissait moins d’un acte d’invention et plus de faire un effort pour se souvenir. Et j’avais besoin de pouvoir partager un processus de réparation, de guérison autant que de réappropriation, de « reclaim » de ces essences constitutives.

Presque à la manière d’un rituel chamanique ?

Un peu oui, si on entend par processus chamanique quelque chose qui faciliterait une mise en relation avec des entités de « nature » et qui permettrait de chercher une guidance ou une forme de transmissions de « savoirs » dans le sensible et sur un plan subtil.
En tous cas adresser la sagesse de plantes ou d’entités du vivant non-humain comme les lichens, les bactéries, les virus etc. Et ça m’intéressait d’ouvrir un espace où une forme de conversation inter-espèces serait possible. Un genre de dispositif d’écoute qui permettrait un « fine tuning » comme pour entendre des fréquences radios qui nous entourent mais que l’on ne perçoit pas forcément.

Comment tu gères cet aspect ritualistique dans le cadre d’une performance qui tient de la conférence, ça parait presque antinomique?

Ça reste pour moi une question à chaque présentation de la pièce, comment éviter une attitude objectivante, ne pas chosifier les lichens et être dans la réitération du principe de « l’Autre ». Et la démarche pourrait prendre une tournure encyclopédique, ce qui est problématique je trouve, et en même temps ça opère un commentaire sur une époque qui plaçait l’humain et ses connaissances au centre des choses. A vrai dire cette friction m’intéressait aussi. Comment déjouer l’aspect naturalia du cabinet de curiosités et trouver une présentation pas trop esthétisante, de cette « nature » extraite de son contexte (dans les cas où la performance a lieu dans un théâtre ou un musée) et comment trouver un registre non discursif, qui ne soit pas non plus abscons ou trop ésotérique et surtout qui ne représente pas un étalage de lichens et de connaissances. Déconstruire aussi cette position de conférencière savante. Au final ce sont les lichens qui font conférence. Le titre fait d’ailleurs référence à La Conférence des Oiseaux, un poème mystique Soufi de Farîd-Ud-Dîn ‘Attar publié en 1177. Il s’agit surtout d’invoquer une autre forme de savoirs et de transmissions. Mais le ton est de toutes façons plus du côté du club de botanique que de la conférence.

En passant du registre de la conférencière à celui de la maîtresse de cérémonie ça te permet en effet de déconstruire ce cadre connoté et référencé historiquement. Et il y a aussi les figures de la conteuse et de l’oracle / traductrice qui interviennent, comment tout ça s’articule pour toi ?

Je crois que tous ces modes de relations participent en fait de la même chose, et font partie d’une transformation qu’on traverse tous ensemble tout au long de la rencontre.
Je suis garante d’un certain espace dans lequel j’invite les gens et vu la jauge réduite il y a presque un aspect domestique qui convoque l’hospitalité et le « care ». Cet espace peut être très fluide avec les acteurs du moment mais il doit aussi être tenu pour assurer un certain hermétisme, pour que les composantes en présence puissent se transformer. Comme un espace alchimique dans lequel on aurait tous un rôle à jouer. La rencontre est d’abord synesthésique et convoque tous les sens, regarder les lichens de très près, les goûter, les respirer, les toucher et petit à petit assez simplement sentir leur résonnance et être touché par eux.
Ce shift dans la qualité d’écoute et d’attention aux détails charge déjà beaucoup la situation et la potentialise. Ca se tisse progressivement avec les personnes et au fur et à mesure collectivement on se met à « sentir » plus.
Le passage à des récits intimes vient rencontrer et mettre en jeu des aspects plus vulnérables et personnels pour moi, mais qui peuvent résonner avec ce que chacun est en train de vivre.
Quand je me propose d’être interprète et d’initier une conversation « inter-espèce » c’est déjà la présence de groupe qui opère.
Je présente les outils de canalisation et de traduction avec autant de transparence et de pragmatisme que possible. Aussi ça peut arriver que si la demande se présente dans l’assemblée et que le temps le permet, il y ait transmission de certains de ces outils pendant la performance.

Quels sont ces outils ? Ils font partis de tes pratiques ?

Pour entrer en résonance j’utilise l’auto-hypnose d’après l’outil transmis par Catherine Contour, ça permet un état de présence à ce qui est et à ce qui se manifeste dans le moment présent. Si tout est champ éléctromagnetique on peut alors s’accorder à d’autres champs en affûtant notre écoute sensible, et en laissant ces champs résonner ensemble, ça crée comme un bain de résonances, qui a une saveur singulière à chaque fois.
Après je propose en général deux outils de « traduction » qui laissent ainsi se déployer ce sensible amplifié. D’abord le dessin, aussi en auto-hypnose, les mains et les médiums de traçage sont comme les aiguilles d’un sismographe, qui viennent rendre compte de ce qui est mobilisé à l’intérieur dans des couches plus profondes. Et dans un second temps une « danse » dans laquelle les manifestations et fluctuations de l’expérience peuvent infuser et mobiliser le corps dans sa dimension plus globale, en passant par l’écoute et le déploiement progressif du corps phénoménal.

Dans cette partie ta présence prend une qualité presque mediumnique, un peu magique

Cela dit si ça génère une bulle un peu sibylline dans laquelle on est tous, le but n’est pas par la suite de décrypter, de chercher à interpréter. Néanmoins j’observe souvent cette tendance - quand le mental reprend le dessus - à vouloir donner du sens et une interpretation à chaque signe qui se manifeste, comme on le ferait d’une langue étrangère. On peut se laisser aller et entrer dans un autre régime de « faire sens », avoir confiance que de l’information est déjà passée, en fait via notre présence au « bain ».

Cela peut aussi juste faire placebo non ?

Tout à fait la dimension performative du placebo est puissante, et l’aspect déclencheur peut varier d’une personne à l’autre en fonction des nos affinités de base et de nos canaux sensoriels préférentiels.
Et pour certaines personnes, comme chez beaucoup d’enfants c’est la pensée magique qui va déclencher la « plongée ».
Mais en général juste le fait de goûter à un autre type de présence aux choses, ce shift de focus - qu’Anna Tsing décrit comme un « art de faire attention » - affecte déjà nos rapports de sens, et ça peut donner une dimension magique au banal, à ce qui est négligé d’ordinaire. Après on peut toujours fictionner et se mettre à croire à sa fiction !

Dans ce type de pratique il y a aussi la question de l’authorship, quel est ton rapport à cela ?

Oui c’est la grande question ! Quand on utilise des processus de canalisation, ça questionne fondamentalement la nature de l’auteur. Ici je ne sais pas si ce sont les lichens qui sont en train de se manifester, ou les bactéries de mon microbiote qui s’expriment de manière phénoménale quand elles sont en résonance avec les lichens, ou si c’est le bain cette rencontre.
Mais je crois que c’est moins une danse du « devenir lichen » – malgré ce que beaucoup de gens aiment y voir – qu’une manifestion dans mon corps ou via mon corps de ce magma de résonances, qui a comme une action motrice « phénoménale » sur le corps physique.
Être mue par des phénomènes qui m’habitent, mais qui me sont étrangers et dont je serai l’hôte. Je ne fais que suivre - dans le tracé et dans le mouvement - donc c’est pas vraiment de l’improvisation et certainement pas une forme écrite dont je serai l’auteur.
Si tu donnes à écouter du « silence », par un cadre que tu proposes, tu n’es pas l’auteur de ce silence, de sa manifestation ou de ce qui va l’habiter, à la John Cage quoi. Je trouve cette idée très libératrice !

Réalisé à wpZimmer à Anvers (Belgique), transcription sur base d’un entretien avec Sébastien Hendrickx, à l’occasion de la performance La Conférence des Lichens, juin 2018



Lectures et films :

  • Art of living on a damage planet, ghosts and monsters of the anthropocene de Anna Lowenhaupt Tsing

  • Le champignon de la fin du monde, sur la possibilité de vivre dans les ruines du capitalisme de Anna Lowenhaupt Tsing

  • Une voix différente de Carol Gilligan

  • When Species Meet de Donna Haraway

  • Staying with the Trouble de Donna Haraway

  • La vie des plantes: une métaphysique du mélange de Emanuele Coccia

  • Reclaim: Recueil de textes écoféministes

  • La sorcellerie capitaliste: Pratiques de désenvoûtement d’Isabelle Stengers et Philippe Pignarre

  • Vibrant Matter: A Political Ecology of Things de Jane Bennett

  • Dark Ecology: For a Logic of Future Coexistence de Timothy Morton

  • Humankind: Solidarity with Non-Human People de Timothy Morton

  • Donna Haraway : Story Telling for Earthly Survival réalisé par Fabrizio Terranova

  • Woman and Nature de Susan Griffin

Création : Novembre 2017, ++ event, curation Helle Siljeholm, Black Box Theater Oslo / Remerciements : Lofoten International Art Festival LIAF, Helle Siljeholm, Catherine Contour, Jean-Paul Rességuier, Fateh Ji, Céline Peychet, Sébastien Hendrickx, Carine Meulders & wpZimmer, Pianofabriek kunstenwerkplaats, Workspace Brussels, subventions Vlaams Kunstenenerfgoed


Elisa Yvelin a étudié à P.A.R.T.S. école d’Anne Teresa de Keersmaeker. Depuis 2010 elle travaille la performance, menant des recherches en lien avec la phénoménologie et différentes pratiques énergétiques — reiki, yoga, alchimie taoïste, hypnose. En tant qu’interprète elle a collaboré avec François Chaignaud, Cecilia Bengolea, Judith Depaule, Lenio Kaklea et Lara Barsacq entre autres.



La Conférence des Lichens

samedi 4 avril, 14h et 16h30